S’éclater

S’éclater

De l’insouciance à la conscience

 

Je suis un bébé des années 60, les sixties pour certains, et j’ai eu 20 ans dans les années 80, une décennie complètement insouciante au regard de nos contemporains.

Oui c’est vrai j’en frissonne encore de cette légèreté de toutes ces années folles, complétement cinglées. C’est vrai….on s’est bien éclaté !

J’ai vécu l’émergence de la musique new Waves ce courant musical avant- gardiste qui a chamboulé et défié le temps, la jeunesse actuelle n’ayant pas hésité à s’en emparer,

J’ai vécu l’explosion des radios libres,  ces radios pirates qu’on écoutait presque en cachette au début… Une nouvelle NRJ qui a transformé le paysage radiophonique jusqu’à encore aujourd’hui,

J’ai connu une jeunesse sans portable, je me demande encore comment on a survécu, avec pour seul usage, la cabine téléphonique du coin de la rue (qui la plupart du temps ne fonctionnait plus),

J’ai connu une jeunesse où on se rendait à nos soirées en mobylette (pour les néophytes, l’ancêtre du scooter), et aucun port du  casque n’était obligé,

J’ai vécu une jeunesse où on fumait des clops partout , des gitanes maïs pour 3 francs 6 sous, dans les avions, les trains, et même dans les débats à la télé,

J’ai vécu une jeunesse où le plein emploi était d’actualité, nul besoin d’envoyer 100 CV pour avoir la chance d’être remarqué,

J’ai vécu une jeunesse où on pouvait partir 3 semaines en vacances à l’étranger sans jamais se ruiner,

J’ai vécu une jeunesse où l’amitié était d’abord une affaire d’humanité, d’embrassades, de franche cordialité, où nos neurones étaient naturellement connectés sans aucun réseau virtualisé,

J’ai vécu une jeunesse où tout était prétexte au fou-rire et à la gaieté, l’insouciance au naturel, sans harcèlement de son prochain ou une quelconque rivalité,

J’ai vécu une jeunesse où l’on pouvait rire de tout car on avait un Coluche comme garde-fou,

J’ai vu sur des plateaux TV  et en direct, des personnes s’entartées, juste pour s’amuser, sans que cela ne déclenche aucune polémique auprès d’un quelconque organisme de censure ,

J’ai aussi vécu une jeunesse où le nuage radioactif de Tchernobyl s’est arrêté aux frontières de la France, mais comme on a trop eu de la chance !!

J’ai vécu une jeunesse où ne connaissant rien à la politique, j’ai pour la première fois voté, et naïvement j’ai pensé qu’un MITTERAND allait tout changer ,

J’ai vécu une jeunesse où l’on a vu un mur s’écroulé le 09/11/1989, et les relations Est Ouest de fait, se dégeler.

Non que je souhaite glorifier cette période insouciante comme on aime tant et tant la qualifier car nous appartenons tous à des générations différentes ayant toutes connues leurs lots de vicissitudes. Non ce n’est jamais mieux avant, c’est juste différent.             .

Je m’adresse toutefois, à tous les insouciants des années 80 , à ceux qui ont aujourd’hui entre 55 et 65 ans, toute cette génération de fumeurs de joints,  sommes-nous pour autant devenus des irresponsables au quotidien ?

A toute la « Boss génération », qui va bientôt afficher  42 annuités à son compteur de labeur de futur voire Feu retraité avant l’heure,  sommes-nous pour autant devenus des caïds en bande organisée?

Et cette insouciance n’aurait-elle pas été le berceau d’une forme de résistance  au cours de ces dernières années ? Je pose ça ici, mais quand on a goûté à une certaine liberté, il devient difficile de se plier face à l’absurdité .

Pour autant, je n’ai surtout pas envie de faire partie de ces vieux cons qui ne cessent de rabâcher : »Je préfère avoir mon âge que le tien », encore un mantra dépourvu de sens, égoïstement proféré, qui ne sert à rien, hormis créer des frictions et divisions, ce dont nous n’avons vraimen pas besoin.

Et si on arrêtait de s’opposer entre générations ?

Le temps n’est-il pas venu de resserrer nos liens intergénérationnels et d’accepter nos différences plus que jamais face à ce qui s’en vient ? Je crois à l’intelligence d’une certaine humanité, à la puissance de la diversité, à la force de la complémentarité, à la richesse des opposés,  jeunes , vieux, hommes, femmes, actif, retraité,  insouciant, rigoureux,  leaders ou fonctionnaires, je crois qu’on a tous une part de colibri à apporter à cette société qui se déconstruit  chaque jour sous nos yeux .

Que notre passé insouciant, que nos failles générationnelles des « eighties » puissent servir de terreau au fondement d’une nouvelle société plus raisonnée, plus harmonieuse, plus libre et surtout plus juste, où chacun puisse trouver sa place, s’épanouir, et faire rayonner son plein potentiel en toute liberté.

Souhaitons que le vent de liberté  des années 80  reprenne son souffle pour les futures générations, et qu’il balaye au passage toute zone d’ombre et d’oppression sur l’avenir de nos enfants.

Et oui, je suis une fille des années 80, devenue femme un peu vintage j’en conviens, mais j’ai envie de faire partie de cet à venir en devenir.

J’ai envie d’appartenir à la suite. Encore un peu.

J’ai laissé tomber depuis bien longtemps mon costume d’insouciance sur le dancefloor de la discomania, pour revêtir, sans aune paillette , et en toute sobriété, ma modeste plume qui n’a qu’un seul but : appuyer sur l’interrupteur pour tous ceux qui ne voient plus rien.