S’éveiller à une autre réalité
S’il est un état d’âme qui me fait tanguer dans les abysses de l’anxiété , c’est bien ce ressenti de tristesse profond que l’on appelle la déception.
Je crois bien que j’ai pris « perpet » dans ce domaine, une bagnarde de l’illusion, condamnée aux galères de la chimère.
Dans notre société contemporaine si superficielle, les maîtres-chanteurs aguerris sont légion et jouent leur ritournelle sous nos balcons, il faut avoir l’oreille fine pour déceler les fausses notes car bien souvent leurs sonates ne collent pas tout à fait à la partition.
Il n’y a pas que les histoires d’amour qui nous entrainent vers ces magiciens de l’ombre, hélas les amis, les collègues de travail, la famille peuvent aussi nous bercer d’illusions et de mille et une façons.
Être déçu c’est ce différentiel, pour ne pas dire ce gap, entre nos espérances , tous ces espoirs fondés et la triste réalité qui s’est avérée tout autre, et nous voilà incapable d’aimer le présent qui nous est proposé.
« Je suis tombée de l’armoire », une drôle d’expression , pour formuler notre sidération, quand, atterrés par cette annonce froide qui nous étourdit , tous nos espoirs d’un coup se sont évanouis.
La déception aurait-elle une autre vocation que celle de nous faire pleurer à chaudes larmes, de nous terrer dans un trou de souris pour ne plus en ressortir, de nous laisser prostrer sous la couette de notre lit , en gros d’anesthésier notre goût pour la vie ?
Et si la déception avait une mission précise, ciblée rien que pour nous, par exemple celle de nous réveiller à une autre réalité et d’ouvrir une nouvelle fenêtre de possibilités ?
A ce sujet, il y a fort à parier que les « désenchanteurs » autour de nous qui nous ont le plus déçus sont nos meilleurs enseignants car ils pointent du doigt avec précision, nos failles mais aussi l’endroit où nous devons nous réajuster.
Alors oui , « chat échaudé craint l’eau froide et on ne m’y reprendra plus », voilà pourtant deux théorèmes insipides que je refuse d’appliquer.
J’ai cette conviction intime que chaque action foirée, chaque beau parleur rencontré, chaque projet de vie même avorté a un sens, et nous mène quelque part, à un endroit de notre destinée, déçu ou pas, et que rien n’est vain. Ce qui importe n’est pas la destination, mais bel et bien les pas que nous faisons chaque jour sur ce chemin difficile que nous arpentons au quotidien.
La déception est essentielle et inévitable dans notre parcours terrestre, pour autant il s’agit d’un carcan dans lequel je n’ai pas envie de m’enfermer . La vie, quant à elle, a bien plus grand à nous offrir et c’est une chasse aux trésors quotidienne, pour qui veut bien orienter son angle de vue différemment.
Mais pour participer à cette grande festivité, encore faut-il avoir foi en ce flux de vie qui coule en nous et en sa magie, en accepter ses énigmes, ses tourments …et ses mirages aussi.
Pour ma part j’ai pris le parti de surfer sur la vague de la déception, de toutes mes déceptions même les plus cuisantes, de faire corps avec elles, et remonter sur la planche. Ce n’est qu’à cette seule condition que je pourrai transformer les larmes de mes désillusions, qui ont tant plombé mes espérances, mes joies et mes envies, en fil d’or enchanté, afin de décrocher, tiens pourquoi pas, la lune et les étoiles avec.
Alors blessure de trahison ou d’illusion ? Qu’importe car au final, il y a forcement une autre Terre promise qui nous attend vers un nouvel horizon.
Véronique
